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Les blogs du Diplo
M. Obama, le
Proche-Orient et Rahm Emanuel
Alain Gresh
Vendredi 7 novembre 2008 C’est avec euphorie que les soldats
américains ont salué la victoire du candidat Barack Obama à
l’élection présidentielle, malgré les tentatives du Pentagone
pour empêcher que les médias puissent évoquer cet enthousiasme
(lire l’éditorial du New York Times du 7 novembre,
« Keep Your Euphoria To Yourself, Soldier ». Beaucoup
espèrent, évidemment, que le nouveau président accélérera leur
retrait d’Irak.
D’autre part, « Tzipi
Livni met en garde Barack Obama contre des négociations avec
l’Iran » (AP, 6 novembre) : « “En ce moment, le dialogue
risque d’être interprété comme une faiblesse”, a averti Tzipi
Livni, qui dirige le parti Kadima au pouvoir en Israël et qui
briguera le poste de Premier ministre lors des législatives de
février prochain. “Je crois qu’un dialogue prématuré, à un
moment où l’Iran a l’impression que la communauté internationale
a abandonné l’idée de sanctions, pourrait s’avérer
problématique”. »
Il est certes beaucoup trop tôt pour dégager les grandes
lignes de ce que sera la politique de M. Obama. Que deviendra la
guerre contre le terrorisme ? L’Afghanistan sera-t-il « la
bonne guerre » de la nouvelle administration ? Quels seront
les rapports avec l’Iran, la Syrie, les Palestiniens ?
Pour le savoir, il faut attendre de connaître l’équipe de
politique étrangère que désignera le nouvel élu. La première
nomination est plutôt inquiétante.
Barack Obama a nommé M. Rahm Emanuel au poste stratégique de
secrétaire général de la Maison Blanche. Dans un article du
Figaro.fr — « Obama
prend Rahm Emanuel comme bras droit », Constance Jamet
dresse son portrait.
« Parmi les nombreux noms cités pour faire partie de
l’administration Obama, un désormais est sûr. Il s’agit de Rahm
Emanuel. Ce représentant de l’Illinois a accepté mercredi de
devenir le secrétaire général de la Maison-Blanche, a annoncé
Barack Obama. Le parlementaire, âgé de 48 ans, a réfléchi à
l’offre du futur président américain pendant plus de
vingt-quatre heures. Il redoutait l’impact de cette nomination
sur sa famille et ses trois jeunes enfants. Toutefois, à en
croire certains journalistes, ce proche du 44e président des
Etats-Unis convoitait, avant cette proposition prestigieuse, la
place de Nancy Pelosi, la présidente de la Chambre des
représentants, et aurait plutôt hésité entre les deux positions.
Tous deux élus de l’Illinois, Rahm Emanuel et Barack Obama
fréquentaient les mêmes cercles politiques à Chicago. Les deux
hommes se sont rapprochés lorsque Barack Obama est arrivé à
Washington, en 2004, après avoir été élu sénateur.
(...)
Rahm Emmanuel connaît bien la Maison-Blanche : il y a
travaillé en tant que conseiller politique sous l’administration
Clinton, de 1993 à 1998. Le diplômé en communication, qui
commença sa carrière, à la fin des années 80, auprès du maire de
Chicago, a croisé le chemin de Bill Clinton à la fin 1991.
Emanuel devient son collecteur de fond. Terriblement efficace il
y gagne le surnom de “Rhambo”, il récolte la somme record — à
l’époque — de 72 millions de dollars. Ce trésor de guerre permet
à Bill Clinton de balayer ses adversaires à la primaire
démocrate et de survivre aux scandales qui éclatent lors de sa
campagne de 1992. “Nous n’aurions jamais rien pu accomplir sans
lui”, déclara le 42e président américain. A la Maison-Blanche,
Rahm Emanuel soigne l’image de son mentor. Il se montre ainsi
très directif vis-à-vis de Tony Blair, qui doit tenir une
conférence de presse au coté de Bill Clinton, alors empêtré en
plein scandale Lewinsky : “ne foirez pas cette apparition, c’est
important”, lui lance-t-il, comptant redorer avec cette
apparition “politique et sérieuse” le blason de Clinton.
A la fin de l’ère Clinton, Rahm Emanuel quitte brièvement la
politique et se reconvertit dans la banque. Ses trois ans en
tant que manager à la Dresner Kleinwort lui rapporteront plus de
16 millions de dollars. Cet intermède banquier s’achève en 2002
lorsqu’Emanuel se présente à la Chambre des représentants. Ayant
siégé quelque temps, au conseil d’administration de l’organisme
de prêts Freddie Mac, le parlementaire a toujours refusé de
voter toute législation pouvant concerner son ancien employeur.
Rahm Emmanuel est, malgré lui, une figure du petit écran
américain : il a inspiré dans la série “A la Maison-Blanche” le
personnage de Josh Lyman. Ironiquement son frère, Ari, un
célèbre agent de stars de Los Angeles, a lui servi de modèle
pour créer Ari Gold, le héros de la comédie “Entourage”. Rahm
Emanuel est à l’origine d’une des images les plus célèbres de la
présidence Clinton. Il a supervisé, jusqu’à la chorégraphie, la
poignée de mains historique entre Rabin et Arafat lors de la
signature, en 1993, des accords de paix d’Oslo.
Le Proche-Orient tient une place cruciale dans le cœur du
représentant de l’Illinois. Son père, Binyamin Emanuel, un
pédiatre, est né en Israël et a émigré avec sa famille aux
Etats-Unis dans les années 60. Peu avant la première guerre du
Golfe, en 1991, Rahm Emanuel s’est porté volontaire, en tant que
mécanicien, auprès d’un bureau de recrutement de Tsahal. Durant
deux mois, il a réparé des blindés près de la frontière
libanaise. Très pieux, il a tenu à obtenir, lors de l’examen du
plan Paulson, une dispense de son rabbin pour pouvoir travailler
en pleines fêtes du nouvel an juif de Rosh Hashana.
Sa nomination a suscité l’enthousiasme de journaux
israéliens. Maariv le présente comme “notre homme à la Maison
Blanche”. “Il va influer sur le président pour qu’il soit
pro-israélien. Peut-il laisser sa conscience hors de la
Maison-Blanche ?”, a affirmé Binyamin Emanuel au quotidien. »
Sur le site Bakchich.info, un article du 5 novembre, « “Rahm-bo”
futur dir’cab de Barack Obama » par Doug Ireland, évoque
également cette nomination.
« Son style et ses prises de positions guerrières en
politique ont valu à Emmanuel le sobriquet de “Rahm-bo”. Décrit
par le quotidien Chicago Sun Times comme “mordant, impitoyable,
froid, arrogant et manipulateur”, Rahm Emmanuel est le fils d’un
immigré israélien. Son père était un vétéran de l’Irgoun, la
milice extrémiste israélienne du fascisant Vladimir Jabotinsky
avant l’Indépendance de l’Etat hébreu. A son tour, “Rahm-bo” a
toujours été un féroce supporter d’Israël et ne porte guère les
Palestiniens dans son coeur. Lors de la première guerre avec
l’Irak, en 1991, il est même retourné en Israël pour servir
comme volontaire civil au sein de Tsahal.
Il a gagné ses galons en politique électorale en devenant un
spécialiste des campagnes négatives. N’hésitant pas, par
exemple, dans les années 80, à faire battre un républicain
modéré du Congrès favorable à un Etat palestinien en faisant
circuler une photo truquée de lui le montrant en compagnie de
Yasser Arafat. »
En revanche, la Serbie se félicite de cette nomination. Selon
une dépêche de l’AFP en provenance de Belgrade. « Presse et
analystes saluaient vendredi à Belgrade la nomination par le
président élu Barack Obama de Rahm Emanuel comme secrétaire
général de la Maison Blanche, relevant qu’il co-préside au
Congrès la commission en charge des relations avec la Serbie.
“De bonnes nouvelles en provenance de Washington : un lobbyiste
de la Serbie à la tête du cabinet d’Obama”, titrait même le
quotidien populaire Press en première page. Plusieurs autres
journaux serbes se félicitaient de cette nomination. Rahm
Emanuel co-préside la commission du Congrès (caucus) sur la
Serbie, qui rassemble des parlementaires démocrates et
républicains chargés de développer les relations entre les
Etats-Unis et la Serbie. Il est à la tête de cette commission
depuis septembre 2004. »
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