Opinion
Syrie
Alain Corvez
Alain
Corvez
Jeudi 29 août 2013
L’Amérique et ses partenaires les plus
zélés, réunis dans une alliance
faussement appelée occidentale, viennent
de franchir un degré dans leur action de
soutien aux takfiristes internationaux
qui veulent depuis plus de deux ans
renverser le régime syrien. Utilisant
leur contrôle d’énormes moyens de
communication, ils viennent de lancer
une campagne d’intoxication de l’opinion
internationale visant à la convaincre
que le gouvernement syrien a utilisé
l’arme chimique contre son peuple et
mérite » d’être puni ».
Aucune
preuve n’a été présentée car tout
indique que ce sont les rebelles qui ont
utilisé cette arme, au moment même où
une équipe d’inspecteurs de l’ONU était
sur place, avec l’accord des autorités,
pour enquêter sur de précédentes
utilisations sporadiques par les
rebelles.
Ces
mensonges médiatiques et politiques, qui
rappellent les tristes souvenirs d’Iraq
et de Libye, ont pour but de justifier
une intervention militaire afin de
renverser un régime laïque jugé hostile
par les Etats-Unis depuis longtemps.
Paradoxalement, l’Amérique aiderait par
cette action ses ennemis d’hier, Al
Qaïda et consorts, qui contrôlent
désormais les opérations conte les
forces régulières et ont montré leurs
méthodes inhumaines, à installer à Damas
un régime qui en serait l’émanation.
En dépit d’une
déferlante médiatique voulant faire
croire que le bien est du côté de
l’Amérique et ses alliés et emporte
l’adhésion de la plupart des nations,
l’immense majorité des états du monde
s’est déclarée farouchement opposée à
des frappes militaires, que ce soit en
Afrique, en Asie ou en Amérique latine
et même en Europe. En dehors des états
arabes affidés de l’Amérique qui
soutiennent depuis le début cette
campagne contre un axe dit chiite, la
plupart des peuples arabes, à l’image de
l’Egypte, s’oppose aussi à cette action
guerrière. En dehors des
« occidentaux », les états du monde
apportent donc leur soutien total aux
deux membres permanents du Conseil de
Sécurité de l’ONU,
la Russie
et
la Chine qui ont
clairement indiqué qu’elles
n’autoriseraient pas une action armée
contre la Syrie.
Diverses
agences de communication diffusent des
mensonges sur une prétendue évolution de
la position du président Poutine sur la
crise, en échange d’avantages prétendus
qu’aurait promis « l’Occident », alors
qu’il n’en est rien et que la subtile
diplomatie russe a sans doute apporté
les preuves des mensonges, confirmé son
intransigeance, et proposé une porte de
sortie honorable à ceux qui se sont
enfoncés dans une impasse.
Il est
probable que l’Amérique n’ira pas
jusqu’à l’affrontement militaire et
reviendra à une position plus
raisonnable dans les jours ou les
semaines qui viennent.
Depuis la
présidence de Nicolas Sarkozy la France aligne ses relations
internationales sur celles de l’Amérique
et perd de ce fait l’énorme capital de
sympathie que la politique du Général de
Gaulle de non ingérence dans les
affaires intérieures des états et de
défense du droit des peuples à disposer
d’eux-mêmes lui avait constitué. Elle
devrait reprendre les relations amicales
qu’elle avait avec les pays, en
particulier avec ceux qui ont subi
l’impérialisme sous une forme ou une
autre et, utilisant sa connaissance
ancienne et en profondeur des
différentes cultures du monde, favoriser
le dialogue pour la résolution des
conflits.
Alors, elle
pourra à nouveau tenir haut l’étendard
de la raison dans les relations
internationales, raison qui semble
aujourd’hui échapper complètement aux
tenants des actions guerrières, à l’âge
de la dissuasion thermonucléaire.
Aucune
cause soi-disant humanitaire aujourd’hui
ne justifie une action guerrière. A
l’instar des attaques américaines de
l’Iraq, de l’Afghanistan, de la Libye, toutes au nom de beaux
principes, elles ne laissent que
ravages, drames et terrorisme dans leurs
sillages.
Hormis le
fait que rien ne justifie un
renversement du gouvernement syrien qui
a entrepris une œuvre de réconciliation
nationale qui porte ses fruits puisque
de nombreux rebelles ont soit cessé le
combat, soit rejoint les forces
régulières, une attaque « occidentale »
créerait de nouveaux drames pour la
population et n’aurait aucune issue, le
processus guerrier ne pouvant être
contrôlé. Les seuls à en tirer profit
seraient les takfiristes barbares qui
sont encore à l’œuvre sur le terrain,
bien que de plus en plus neutralisés par
les forces régulières.
Alain Corvez est
conseiller en stratégie internationale
Le
dossier Syrie
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