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Al-Ahram Hebdo
Gaza saigne
Maha Salem
Photo Al-Ahram
Mercredi 31 décembre 2008
Palestine.
Israël
lance depuis samedi une série de raids aériens meurtriers contre
le Hamas à Gaza. L’opération surnommée « plomb durci » constitue
une attaque d’une ampleur sans précédent dans un territoire
palestinien.
A
quelques jours de la nouvelle année, la bande de Gaza a vécu les
journées les plus meurtrières en soixante années de conflit au
Proche-Orient. Plus de 270 Palestiniens ont été tués et 700 ont
été blessés dans le premier jour des bombardements aériens
massifs menés sur la bande de Gaza par l’armée israélienne. Et
en quatre jours, le nombre a atteint 360 morts et 1 690 blessés.
Un bilan lourd et voici que la communauté internationale ferme
toujours les yeux. Rien que des appels pour un cessez-le-feu
immédiat, des condamnations, des réunions d’urgence, mais pas de
mesures concrètes contre Israël pour l’obliger à arrêter ses
bombardements.
D’urgence ... mais bien quatre
jours après l’offensive israélienne, les ministres des Affaires
étrangères de l’Union européenne se réunissaient hier mardi à
Paris pour se concerter sur les efforts de règlement de ce
conflit vu comme opposant Israël au Hamas, un point c’est tout.
« Les ministres évoqueront la contribution de l’Union européenne
au règlement de la crise actuelle, en liaison avec les efforts
de la communauté internationale, notamment ceux du secrétaire
général des Nations-Unies », a précisé le Quai d’Orsay dans un
communiqué. Et la France a réaffirmé que la priorité devait être
un retour à la trêve entre Israël et le Hamas. « Notre priorité
immédiate est l’arrêt des violences et le retour à la trêve.
C’est la demande exprimée par la présidence du Conseil de
l’Union européenne dès la fin de la trêve et par le Conseil de
sécurité des Nations-Unies samedi dernier », a précisé le
porte-parole. Réuni aussi en urgence, le Conseil de sécurité des
Nations-Unies a appelé dimanche à l’arrêt immédiat des violences
dans la bande de Gaza. Mais les appels sont restés lettre morte.
Pourtant, la déclaration du Conseil de sécurité n’est pas
contraignante et Israël poursuit son offensive.
De plus, les autorités
américaines ont jeté la responsabilité de ces raids sur les
victimes, en accusant le Hamas d’être la principale cause de ces
raids. « Si le Hamas arrêtait de lancer des roquettes sur
Israël, celui-ci n’aurait pas besoin de mener des frappes à
Gaza. Ce que nous voulons voir, c’est que le Hamas cesse de
tirer des roquettes sur Israël », a déclaré le porte-parole de
la Maison Blanche, Gordon Johndroe.
C’est adopter le point de vue
d’Israël qui s’est dit devoir agir pour se défendre et faire
cesser les tirs de roquettes et d’obus de mortier contre son
territoire. Et un porte-parole militaire israélienne, Avital
Leibovitz, a affirmé que les forces terrestres israéliennes sont
prêtes à agir contre le Hamas à Gaza sans donner d’indication
sur le moment choisi pour une telle action. Une annonce exprimée
par plusieurs responsables israéliens. Le vice-ministre
israélien de la Défense, Matan Vilnaï, a souligné : « Nous
sommes prêts à un conflit prolongé et à des semaines de combat
».
Quant à Ehud Barak, ministre de
la Défense, il a insisté que « si les tirs criminels contre
Israël et ses citoyens ne cessent pas totalement, Israël aura
recours à tous les moyens et tous les types d’actions légaux
dont il dispose pour faire en sorte que l’ennemi mette un terme
à ses agressions illégales ». Plus tôt, Barak avait déclaré au
Parlement que les Israéliens étaient « engagés dans une guerre
sans merci contre le Hamas et ses alliés. Notre offensive a pour
objectif d’améliorer la situation sécuritaire à long terme de la
région bordant la bande de Gaza ».
Le numéro 2 du gouvernement, le
vice-premier ministre Haïm Ramon, est allé plus loin en
annonçant que « le but de l’opération est de faire tomber le
régime du mouvement islamiste, et qu’après l’opération, il ne
restera plus aucun bâtiment du Hamas debout à Gaza ».
Réactions palestiniennes
En riposte à ces bombardements,
le président palestinien Mahmoud Abbass a qualifié l’offensive
israélienne « d’agression lâche et dénoncé les massacres dans la
bande de Gaza. La Palestine n’a jamais vu de massacre plus
hideux » a-t-il déclaré. Le chef de l’équipe palestinienne de
négociations avec Israël, l’ancien premier ministre Ahmad Qorei,
a annoncé la suspension de ces pourparlers, qui piétinent
d’ailleurs depuis un an.
Quant au Hamas, il a rejeté la
proposition du président palestinien Mahmoud Abbass qui
entendait « procéder à des consultations avec tous les partis
palestiniens, y compris le Hamas », sur l’opération israélienne.
Et tous les chefs du Hamas ont exprimé des avis semblables. En
effet, leurs annonces expriment que le Hamas campe toujours sur
ses positions et qu’il ne changera pas sa politique. A cet
égard, Faouzi Barhoum, porte-parole du Hamas, a exhorté dimanche
l’ensemble des factions armées palestiniennes à résister à
l’offensive israélienne par « tous les moyens disponibles, y
compris les opérations suicide ».
Quant au chef du gouvernement du
Hamas, Ismaïl Haniyeh, il a répliqué que les attaques
israéliennes ne feraient pas plier son mouvement. Le Hamas a
appelé sa branche armée, les brigades Ezzeddine Al-Qassam, à «
mettre tous les moyens en œuvre pour empêcher les sionistes de
dormir ». Son chef politique, en exil, Khaled Mechaal, a appelé
à déclencher une nouvelle Intifada contre Israël et a évoqué une
reprise des attentats suicide. « Nous appelons à une Intifada
contre l’ennemi (Israël, ndlr). La résistance va se poursuivre
par des opérations suicide », a déclaré Khaled Mechaal, qui vit
à Damas. Il a insisté que les brigades Ezzeddine Al-Qassam (le
bras armé du Hamas) connaissent leurs obligations, en ripostant
à l’agression. « Les habitants de Gaza ont opté pour la
résistance ».
Appelant au secours, le Hamas a
invité les pays arabes à rompre leurs liens avec Israël s’ils en
avaient et à œuvrer ensemble pour mettre un terme au blocus de
la bande de Gaza. Quant aux Arabes, tous les pays ont condamné
ces bombardements. Et les ministres des Affaires étrangères de
la Ligue arabe se réuniront ce mercredi au Caire. Un autre
sommet au niveau des chefs d’Etat aura lieu le vendredi 2
janvier à Doha.
Mais, les analystes estiment que
l’issue de cette question est entre les mains du Hamas et non
pas des pays arabes. Emad Gad, politologue au Centre d’Etudes
Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, a expliqué : « Il
est temps que les factions palestiniennes s’unissent pour lutter
contre l’Etat israélien. Ils (les chefs et les leaders
palestiniens) doivent comprendre que le premier vainqueur de
leurs différends c’est Tel-Aviv ». Un avis partagé par plusieurs
analystes. En effet, Israël considère la bande de Gaza comme «
une entité terroriste » et lui impose un blocus depuis que le
Hamas y a pris le pouvoir en juin 2007. « Et malgré ce blocus,
les Palestiniens résistent toujours. Les dirigeants israéliens
étaient pressés d’agir par une opinion publique excédée par les
tirs de roquettes, surtout avec l’approche des élections
législatives anticipées du 10 février. L’Egypte a averti,
plusieurs fois, qu’Israël mettrait ses menaces en exécution
surtout après l’expiration de la trêve avec le Hamas. Et ce
dernier refuse de renouveler la trêve », ajoute Emad Gad.
Par ailleurs, Mechaal a affirmé
qu’il est « prêt à la réconciliation ». Mais il a demandé au
préalable l’arrêt des négociations de paix entre l’Autorité
palestinienne de Mahmoud Abbass et Israël. « Ni les roquettes
(lancées par le Hamas contre Israël), ni les opérations suicide
ne sont absurdes. Mais les négociations le sont », a-t-il
martelé. « Ces négociations ne servent qu’à gaspiller du temps
et à améliorer l’image de l’ennemi dans le monde. Il faut
arrêter immédiatement les négociations ainsi que la coopération
sécuritaire avec l’ennemi », a-t-il avancé.
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AL-AHRAM Hebdo
Publié
le 31 décembre 2008 avec l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo
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