Opinion
La Syrie du
président Assad:
Rôle déterminant dans l'émergence d'un
monde multipolaire
Akil
Cheikh Hussein
Photo:
Sana
Mercredi 8 février
2012
Un
certain analyste arabe parmi ceux
corrompus par le pétrodollar saoudien et
qatari a mobilisé toute son intelligence
pour arriver, tout déçu et chagriné, à
la conclusion suivante en ce qui
concerne la crise syrienne : "Les
Arabes, a-t-il dit, n'ont pas fait assez
d'efforts pour convaincre la Russie de
ne pas opposer son véto au projet
arabo-occidental" présenté au Conseil de
sécurité pour obtenir une énième
condamnation du régime syrien.
Il
pensait, parait-il, que les Arabes dont
il parlait, auraient dû déployer les
armes qu'ils utilisent de coutume pour
soudoyer certains journalistes,
analystes ou mêmes certains éminents
chefs d'Etats ou d'organisations
régionales et internationales.
Et il
pensait, parait-il, que la Russie est
encore dirigée par un Gorbatchev ou un
Elstine qui n'avaient d'autres soucis
que de brader leur pays et l'humilier au
profit des puissances impérialistes.
On sait
que depuis des années, la Russie de
Poutine adopte un discours qualifié de
"soviétique" par nombre d'observateurs
et agit de manière plus ou moins
conforme à ce discours. Et ce n'est pas
au moment où l'Occident croule sous le
poids de ses défaites militaires et ses
crises économiques et sociales que des
pays aussi grands et aussi ambitieux
comme la Russie et la Chine vont jeter
les armes.
Loin
d'être motivé par la seule volonté de ne
pas se laisser flouer comme c'était le
cas en Libye, ou d'empêcher une possible
intervention militaire occidentale en
Syrie pour des raisons tactiques, le
double veto russe et chinois est, avant
tout, l'expression d'une contre-attaque
entamée, une vingtaine d'année après
l'effondrement de l'Union soviétique,
par ces deux pays en réponse à
l'expansion multiforme du Nato et des
Etats-Unis en Europe de l'Est, au
Caucase, en Asie centrale et dans le
pacifique.
La
position prise au Conseil de sécurité
par la Russie et la Chine témoigne d'un
retour en force de ces deux pays sur la
scène politique internationale. Ce
retour met fin à une longue période
marquée par l'hégémonie exercée par les
Etats-Unis et ses alliés sur le monde et
les institutions des Nations unies à
commencer par le Conseil de sécurité.
On
n'est plus, avec le double veto, au bon
vieux temps où il était possible de
justifier par la force du mensonge et de
l'intimidation une injuste troisième
guerre mondiale destinée à pacifier le
monde entier à partir de l'Afghanistan
et de l'Irak. La Conseil de sécurité
n'est plus une caverne de bandits,
d'hypocrites et d'opportunistes à la
solde de l'empire américain mondial.
Il est
vrai que 13 parmi les 15 membres du
Conseil ont voté en faveur du projet
arabo-occidental. Mais la position de la
Russie et de la Chine a réconforté des
pays qui, de l'Inde, au Brésil, en
passant par l'Argentine, l'Afrique du
sud et même par le Japon et l'Allemagne,
exigent depuis longtemps une réforme des
Nations Unies qui prenne en
considération les nouveaux rapports de
force sur la scène internationale.
Cette
position a donc été un grand pas
effectué vers un monde multipolaire et
plus démocratique à construire sur les
ruines du monopolarisme qui a pour
longtemps soumis le monde aux dictats
américains.
Il va
sans dire qu'une telle évolution ne
pouvait pas avoir lieu si le
Moyen-Orient n'a pas été le théâtre d'un
enchainement d'événements qui sont en
train de changer le cours de l'histoire
du monde : Le triomphe de la révolution
islamique en Iran et ses répercussions
régionales et internationales, la
défaite de l'armée israélienne au Liban,
le fiasco des Américains et de leurs
alliés en Irak et en Afghanistan, les
révolutions arabes qui ont déstabilisé
un grand nombre de pays soumis à la
tutelle américaine.
Serait-il possible, dans le contexte de
cette dynamique de recul qui frappe le
projet des Américains et de leurs alliés
dans la région, de déclencher une
dynamique inverse par la voie des
gesticulations toujours stériles contre
l'Iran ou des tentatives visant à la
subversion de la Syrie et du Liban ?
Il faut
être aventuriste et assez désespéré pour
l'espérer, surtout lorsque les moyens
classiques de l'intervention militaire
directe s'avèrent inefficaces et trop
coûteux face à des pays qui,
contrairement à l'Irak de Saddam et à la
Libye de Kadhafi, répliqueront avec
beaucoup de force et de détermination.
L'alternative est connue d'avance. Elle
s'inspire d'un vieux proverbe arabe :
"Donne un cheval à ton esclave et
envoie-le au combat. S'il meurt, c'est
lui qui meurt. S'il gagne, il gagne pour
toi".
Mais il
existe des Syriens et des Arabes qui
n'ont pas assez de mémoire ou de
connaissance de ces choses archaïques.
Ils rêvent maintenant d'une intervention
militaire du Nato sans passer par le
conseil de sécurité. Comme en Corée et
au Kossovo.
Ils ne
savent pas aussi qu'on ne se baigne
jamais deux fois dans le même fleuve :
Ceux qui se sont intervenus dans les
deux pays mentionnés disent haut qu'ils
ne sont pas pour une intervention
militaire. Ils comptent créer un "groupe
des amis du peuple syrien".
Autrement dit, ils comptent aider les
groupes terroristes actifs en Syrie par
tous les moyens de la guerre soft :
Propagande aux sources inépuisables,
jusqu'au dernier sou dans les caisses de
Qatar et de l'Arabie Saoudite, et bien
sûr jusqu'au dernier terroriste syrien
entrainé par les vagues de la sédition.
Pour
venir, en fin de compte, comme ils l'ont
fait au passé proche et lointain,
demander pardon et tenter d'ouvrir une
nouvelle page avec le régime syrien.
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