Opinion
Libye : la
créature se rebiffe
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Mercredi 30 novembre
2011
Le culot
n'a plus de limite. Après l'ex-numéro 2
de la bande de Benghazi, voici un
éphémère Premier ministre et le numéro 1
en personne qui s'inquiètent des
ingérences étrangères en Libye (sic !).
Commençons par le premier cité,
l'éphémère Premier ministre qui fut,
aussi, ministre des Finances. Il insulte
ses compères «révolutionnaires» en nous
disant ceci : «Les voix que nous
entendons aujourd'hui sont les voix de
l'élite, les voix du Conseil national de
transition qui n'a pas été élu…», à la
bonne heure ! On ne lui en veut pas de
ne pas savoir que personne ne croit que
la bande qu'il servait ait été élue par
le peuple libyen. On ne lui en veut pas
non plus de vouloir nous apprendre la
chose. Mais, il pousse un peu loin la
chanson, en plus de la déloyauté
vis-à-vis de ceux qui l'ont extirpé de
l'anonymat pour en faire une
personnalité visible et sollicitée par
les médias. Non content de cela il
persiste et ajoute que le nouveau
gouvernement est «soutenu de l'extérieur
par l'argent, les armes et les relations
publiques». On reste sans voix devant un
tel cynisme, quand il faut pourtant
répliquer et rappeler que rien en Libye
d'aujourd'hui, lui-même compris, ne
serait sans des mois de bombardements,
d'approvisionnements en armes, de
dotations financières (qu'il gérait) et
de soutien diplomatique des pays de
l'OTAN et de leurs satrapes pétromonarques. Comme les scrupules ne
l'encombrent pas, il ne nous laissent
aucun répit en se faisant visionnaire :
«J'aperçois un danger pour la
souveraineté de la Libye, j'aperçois une
menace contre les richesses du peuple
libyen». Monsieur Ali Tarhouni, c'est
son nom, un nom qu'il faut retenir pour
la postérité, pour l'illustration de la
duplicité extrême. Jamais peut-être on
ne se sera moqué de la vérité à ce
niveau du ridicule. Un à un, les
«protégés» de l'Alliance atlantique
vont, certainement, se fendre de ce type
de discours. Puisque le grand chef
lui-même que les grands de ce monde ont
brandi devant les caméras et en ont
fait, par procuration, un personnage
arrogant et un exemple à suivre chez les
«Arabes», se met à fustiger le Qatar qui
lui a fabriqué les images des «milliers
de martyrs» initiaux, le «peuple
insurgé», une «révolution». Il s'attaque
au Qatar qui lui a fourni, avec ses
alliés, le «protecteur unifié», un
arsenal et des milliers de
«révolutionnaires». Cela a peut-être
quelque chose à voir avec l'obéissance à
d'autres soutiens mieux cotés en termes
de puissance et d'influence ou de
proximité d'intérêt, seulement, il
devrait mettre de la discrétion avant
que de s'exprimer publiquement.
C'est-à-dire qu'il aurait dû user d'un
minimum de diplomatie pour, au moins,
voir venir et mesurer les réactions d'un
émir qui a le vent en poupe et qui ne
peut freiner, facilement, son élan. La
preuve, c'est tout penaud qu'il avoue
s'être fait rappeler à l'ordre. Pour la
simple raison qu'on ne passe pas, de but
en blanc, du statut de créature à celui
de partenaire respecta-ble du maître
d'œuvre. L'émir, du reste fort poli pour
la circonstance, lui a fait répondre
qu'il avait le droit de s'immiscer car
il avait «parié sur le succès» de
l'opération qui a été concoctée contre
le pays. Histoire de rappeler que son
immixtion, depuis le début, n'avait rien
à devoir au droit et qu'elle s'est faite
de facto.
Article publié sur
Les Débats
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