Opinion
Alliance
atlantique : « rêves et désillusions »
Ahmed Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Mardi 30 juillet 2013
Le « printemps » des Arabes et assimilés
n’aura pas duré le temps du moindre
bourgeon. Nous en venons à nous rappeler
la politique à grand spectacle que nous
ont offert les puissants de ce monde,
euphoriques et confiants sur un avenir
qu’ils promettaient radieux aux heureux
élus de la saison verdoyante. Le feu
d’artifice fut ce sommet du G8 à
Deauville en France, fin mai 2011. Un
sommet « mâtiné de printemps arabe »
titrait un grand quotidien français. Et
pour cause. Ce devait être le « moment
fondateur » d’un partenariat rénové avec
le monde dit arabe, aggloméré dans une
sémantique bien à propos, puisqu’il
s’agissait encore en ce temps-là de
planter des pousses, à coup de bombes en
Libye, en attendant d’aller réaliser la
même opération en Syrie où les
préparatifs étaient en cours. « Les
changements historiques actuellement à
l'œuvre en Afrique du Nord et au
Moyen-Orient peuvent ouvrir la voie à
des transformations comparables à celles
survenues en Europe centrale et
orientale après la chute du mur de
Berlin », déclamait la déclaration
du G8. Les deux premiers représentants
printaniers, dont les pays ne devaient
rien à des « amis » bienveillants, à
leur machine de guerre et à leur
propagande, sont la Tunisie et l’Egypte.
C’était, précisons-le, avant l’arrivée
des Frères musulmans au pouvoir. Le
représentant tunisien demandait 25
milliards de dollars sur cinq ans et
l’égyptien 10 à 12 milliards à court
terme. Il y a eu des promesses
faramineuses à leur intention et à celle
des candidats qui suivront la voie
tracée, par exemple « la
modernisation de leurs économies, le
soutien au secteur privé ». Ils n’en
verront pas la couleur du moindre
centime, ainsi que leurs successeurs
élus. Par contre, une autre aide est
mise en œuvre sans délais. Les
dirigeants du G8 ont appelé « les
organisations internationales à
travailler avec les partis politiques et
l'opposition politique naissante pour
les aider à mettre au point des outils
permettant de répondre aux aspirations
des populations et de renforcer les
capacités des décideurs et des relais
d'opinion, ce qui constitue le plus sûr
chemin vers la stabilité dans la
région ». Là aussi l’aide n’a pas
fonctionné, non pas faute d’avoir
essayé, mais parce que les Egyptiens et
les Tunisiens étaient assez avertis sur
la chose pour décider par eux-mêmes de
ce qu’il fallait faire. Lorsque les
Frères se furent installés à la tête des
deux pays, le G8 croyait, encore, que
tout allait pour le mieux et le ballet
diplomatique s’est intensifié, sans que
soit débloqué pour autant ce soutien
financier qui devait « éviter que
l'instabilité ne compromette le
processus de réformes politiques »,
sans oublier, bien sûr, de
« concilier cohésion sociale et
stabilité macroéconomique ». Deux
ans ont passé pour que la superbe
affichée à Deauville se transforme en
une profonde désillusion. En dehors de
la Lybie, où les affaires pétrolières
prospèrent sur fond de chaos, rien ne
fonctionne comme planifié. En Syrie la
« révolution » vit une débandade, après
que furent bloqué les bombardiers prévus
pour sa réalisation, en Egypte les
Frères, ces précieux alliés, sont tombés
et en Tunisie ils n’en mènent pas large
devant un torrent populaire qui gonfle
et qui ne manquera pas de les emporter.
Article publié sur
Les Débats
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