Opinion
Le vent risque de
tourner
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Dimanche 27 novembre
2011
La ligue
arabe a enfin pu révéler sa vocation.
Des années durant, depuis sa
constitution, les observateurs naïfs
étaient dépités quant à l'inertie dans
laquelle elle se complaisait. Des
réunions de ministres à la pelle, des
sommets hauts en couleur, pour des
communiqués que personne n'attendait ou
ne prenait la peine de lire. Parfois,
des anecdotes sur les prises de bec
entre dirigeants, vite oubliés. Pendant
longtemps, il faut le dire,
l'Organisation était ‘’polluée’’ par des
trublions, produits frais émoulus des
luttes de libération ou des révolutions
contre des roitelets, vestiges de
l'empire ottoman ou d'un passé décadent.
Mais, les émirs du Golfe arabo-persique
et le roi d'Arabie avaient, quand même
des voix qui comptaient dans
l'arithmétique des votes, même si
jusqu'à une période récente ils ne
pesaient pas lourd dans les rapports de
force internationaux. Ils se
contentaient, alors, de tempérer
l'impétuosité des jeunes nationalismes,
en attendant leur heure. Le coup d'envoi
leur fut donné par l'effondrement du
Pacte de Varsovie, après les changements
intervenus en Egypte, qui bascule dans
la normalisation avec Israël. Les Arabes
ont commencé par faire irruption sur la
scène dans la coalition contre l'Irak.
L'un des leurs. On a pensé à ce
moment-ci que la Ligue allait
s'effondrer ou, au moins, connaître des
défections. Elle survécut, malgré tout.
Elle va survivre à pire. En mars 2011,
ce fut la Ligue arabe qui a déclenché la
violence assassine de l'OTAN sur, un
autre pays membre, la Libye. Ces
jours-ci, c'est la Syrie qui est sur
l'établi et la Ligue, après l'avoir
exclue, lui prépare un sort. On
remarquera que, jamais, il n'y a eu
autant de sérieux, d'acharnement et de
diligence à traiter une question.
Jamais, non plus, il n'y a de
résolutions aussi claires et aussi
concrètes. La «communauté
internationale» en est ravie et les
médias régnants n'ont jamais autant
couvert les conférences arabes. La Ligue
a dévoilé sa mission première. Passé le
temps du containment de l'hostilité à
Israël et des velléités de construction
d'un front uni, les pétromonarchies
passent à l'offensive en entraînant dans
son sillage les ex nationalismes
affaiblis et désemparés. Signe des
temps, l'émir du Qatar mène la danse,
fort de représenter la puissance de feu
occidentale et du privilège de posséder
une chaîne vedette de la désinformation
et de la propagande. Alors que les
«grands pays», autrefois des ténors en
matière de défense de la souveraineté et
de l'intégrité nationales, se
contorsionnent et regardent le bout de
leurs souliers. Après la Syrie, nul ne
sait ce qui sera dicté à ce qui reste
comme pays à «réaligner». Et il
n'en reste pas deux. Sauf si les
manifestants égyptiens inversent la
tendance et brouillent la carte
esquissée. D'ailleurs, la Ligue se tient
coite et l’on devine qu'elle retient
fortement son souffle. Car, en Egypte,
centre de gravité du monde dit arabe, se
jouent la réussite ou l'échec de toute
la dynamique actuelle. Avec le risque
majeur d'une inversion de tendance qui
pourrait avoir un effet boomerang sur
les apprentis-sorciers enturbannés.
Article publié sur
Les Débats
Copyright © 2001-2011- MAHMOUDI INFO
Sarl - Tous droits réservés.
Reçu de l'auteur pour publication
Les analyses d'Ahmed Halfaoui
Le dossier
Egypte
Les dernières mises à jour
|