Opinion
Du droit du sol,
au droit du sang, au droit...
Ahmed Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Dimanche 27 octobre 2013
Elle
creuse, elle creuse la bête. Elle se
fait de moins en moins discrète. Elle
gagne du terrain et s'avance à peine
masquée. Il suffira bientôt de planter
son quartier général et de hisser son
drapeau pour que son règne soit arrivé.
La France, le pays des droits de l'Homme
et du citoyen, est en train de basculer.
Du Front national et des groupuscules
fascistes, où il se confinait, le
discours contre les immigrés et les "
Français pas de souche " est porté sans
aucune honte par des hommes politiques
de plus en plus nombreux. En même temps
qu'il engrosse la société devenue
féconde à sa semence. Tout avait
commencé avec le débat sur l'identité,
après que la communautarisation de la
minorité " musulmane " fut
officiellement décrétée. Ensuite ce fut
le discours islamophobe et anti-rom qui
a fleuri. Deux dangers majeurs devaient
être fabriqués et implantés dans les
cerveaux. Le premier est représenté par
la menace de la remise en cause des "
valeurs françaises ", dites
judéo-chrétiennes, accessoirement
laïques et républicaines, le second par
le déséquilibre démographique que
provoqueraient les flux d'immigrants. En
ce temps-là, comme par pure coïncidence,
ce sont surtout les valeurs de la
libre-entreprise, du libéralisme et du
marché tout puissant qui se sont mises à
faire du mal à la vie de la majorité des
Français. Mais le grand débat n'a pas eu
lieu sur ces bases. La classe politique,
les médias et ceux dont le discours a
des espaces offerts, n'en avaient que
pour la " préservation de l'identité en
péril ". Pendant que des dénis
détruisaient les fondements de ce que
les Français d'en bas ont mis deux
siècles et plus à bâtir, face à la
férocité du profit. C'est-à-dire les
acquis sociaux et des conditions de
travail sécurisantes pour le plus grand
nombre. Aujourd'hui, la bête est allée
plus loin. Comme si elle sentait que le
fruit était mûr. Elle s'attaque au "
droit du sol ", celui qui a fait que,
selon un ancien ministre, " plus de 25 %
des Français ont au moins un grand-parent de nationalité étrangère ".
Eh bien ce droit est ouvertement remis
en cause. Ce qui constitue en soi, la
chute d'un autre tabou. Dans un contexte
très favorable à la chose, où les "
socialistes " au pouvoir font la chasse
aux étrangers et à leurs enfants. Dans
un contexte où 72 % des Français sont
d'accord avec l'abolition du " droit du
sol ", en tant que droit automatique.
C'est-à-dire de confier, pour ce, la
décision à l'administration de faire ou
de ne pas faire qu'un enfant né en
France soit Français. Du côté des
fascistes qui s'assument c'est du pain
béni. Bientôt, une fois le principe
acquis, qui pourra être revendiqué en
tant que réponse à une demande
populaire, les " Français pas de souche
" ne seront plus, de droit, des français
comme les autres. Un autre registre sera
ouvert les concernant. Surtout quand il
s'agira de modifier un peu plus les
rapports sociaux en vigueur, voire de
tout remettre à plat. Ce jour-là, le "
droit du sang " lui-même ne servira pas
à grand-chose et l'ordre qui sera alors
établi, ne se formalisera pas du droit
en général.
Article publié sur
Les Débats
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