Opinion
Les faits et le
contexte
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Dimanche 27 mai
2012
On ne peut,
valablement, juger des faits sans les
situer dans leur contexte. Le contexte
fournit l'intelligence et donne du sens,
sans lui les faits sont nus, absolus et
incompréhensibles. Un Israélien, Matan
Cohen, leader de la campagne mondiale de
boycott des universités israéliennes, a
mobilisé près d'une centaine
d'organisations dans le monde, afin de
boycotter les universités israéliennes.
Matan Cohen considère que «les crimes de
guerre commis par les gouvernements
israéliens contre les Palestiniens
nécessitent une forte dissuasion de par
le monde, et il n'y a pas mieux qu'une
action israélienne déclarée pour les
combattre». Ce qui se traduit dans les
faits par considérer que «l'université
qui entretient des relations normales
avec Israël est, elle aussi,
illégitime». On est bien au strict
opposé de l'attitude faussement naïve
vis-à-vis du drame palestinien. D'autres
intellectuels israéliens mènent une
action en direction des groupes musicaux
occidentaux pour les convaincre de ne
pas se produire dans des concerts en
Israël. Ils en ont persuadé
quelques-uns. Le message était simple et
sans fioritures : «Comment accepter de
venir chanter en Israël à l'heure où
l'armée israélienne commet des crimes
contre les Palestiniens et ceux qui les
soutiennent». En dehors des Israéliens,
des syndicats du monde entier, comme
Unison, le plus grand syndicat anglais
qui compte 1,4 million de membres, le
Syndicat des travailleurs et
travailleuses des postes du Canada
(STTP), le Syndicat canadien de la
fonction publique de l'Ontario
(SCFP-Ontario), ont rejoint le
mouvement. Et la liste est encore longue
de ceux et de celles qui pensent que
l'Etat sioniste doit être isolé pour le
pousser à se conformer à la légalité
internationale et au respect des droits
du peuple palestinien. La route est
longue, mais elle a été entamée. Libre à
ceux qui, pour le prix d'une notoriété
dérisoire, se laissent glisser dans le
confort que procure la reconnaissance
empoisonnée par les pires criminels
d'aujourd'hui. Leurs bravos empressés
dénotent, d'ailleurs, du désespoir de
l'effondrement des mythes. Le sionisme
finissant ne trompe plus grand monde,
sauf les derniers candidats au gotha
médiatique, toujours aux ordres. En
miroir, on est libre d'aller (ou de ne
pas aller aussi) en Israël. Certains ont
usé de cette liberté. Ils ont été mis à
l'index et n'ont pas aimé. C'est
légitime de ne pas apprécier les mises à
l'index. Mais, dans le cas précis de
Boualem Sansal, il y a matière à ne pas
s'en tenir à cette contradiction
apparente entre la liberté de se rendre
où l'on veut et la réaction que peut
engendrer ce choix. Aller en Israël
n'est pas un acte anodin, surtout pour
un Algérien, célèbre de surcroît, de
cette célébrité universelle courue de la
presse mondialisée et de la machine
propagandiste sioniste. La bataille de
l'opinion publique étant au centre des
enjeux, la contradiction se situe, donc,
entre, d'une part, un acte militant, et
c'en est un, de désavouer les
antisionistes, et le combat d'un peuple
spolié et opprimé par le sionisme. Ceci
étant, Israël a encore marqué un point,
donné par la nationalité du visiteur, au
pays du «lait et du miel», comme il le
rappelle.
Dont acte,
pour peu qu'il assume sa démarche et
qu'il ne fasse pas l'innocent, persécuté
par l'intolérance.
Article publié sur
Les Débats
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