Opinion
Belkhadem
prophétise sans risque
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Vendredi 23 décembre
2011
Abdelaziz Belkhadem est en passe d'être sacré
génie de la prospective politique en
Algérie. Il n'a rien fait pour, il a
juste assez de jugeote pour ne pas
emboucher la trompette en vogue. Ce sont
plutôt les médias fast-food qui veulent
fabriquer la réalité, qui vont lui
offrir la palme de la perspicacité. Ces
médias qui ont fabriqué ce «printemps»,
qui fait fureur dans le monde des
concepts appliqués au monde dit arabe, à
partir de confortables simplifications
et au service d'une propagande soucieuse
de récupérer toute velléité
d'émancipation du joug du
néolibéralisme. En divergeant avec la
sentence qui donne l'avenir aux
islamistes, ou à ceux qui s'évertuent à
leur ressembler, alors qu'ils excellent
dans le baisemain des infidèles et
rivalisent de zèle dans le relookage de
leur doctrine, façon BCBG à la turque,
Belkhadem détonne. Sa phrase : «Il n'y
aura pas de raz-de-marée islamiste en
Algérie», fait le tour des rédactions et
occupe les unes de la majorité des
titres. Nulle part on ne trouvera les
attendus ou les arguments qui ont abouti
à cette conclusion. Il suffit qu'elle
sorte de l'ordinaire et insulte
l'intelligence consacrée. La raison en
est que l'opinion publique compte pour
si peu, qu'il devient inutile de la
consulter. Apporter la contradiction
coûte de rompre avec les méthodes en
cours. Parler à la place du peuple est
beaucoup plus utile (politiquement).
Tant pis pour ceux qui carburent au
rationnel et qui ne croient que sur
preuve, ils devront se contenter de
s'interroger sur les causes de ce mépris
souverain du bon sens. Tant pis pour
ceux qui voudraient que des enquêtes,
sur les intentions de vote des
Algériens, leur soient présentées. Une
opération qui économiserait pas mal de
circonvolutions verbeuses, d'encre et de
polémiques et qui a le défaut de battre
en brèche la manipulation. Le chef
actuel du FLN doit en avoir des données
dans sa besace, les grands médias
doivent avoir les moyens de faire les
mesures qu'il faut, mais le jeu n'a pas
la prétention de clarifier quoi que ce
soit. Peu importe qu'il y a deux ou
trois mois on en était à pronostiquer
tout le contraire, en prédisant une
«lame de fond démocratique». Les héros
de cette période portaient jeans et
catogans, c'étaient des filles et des
garçons rompus à l'organisation sur
Internet et férus de modernité
occidentale. Et puis, comme par
enchantement ils ont disparu de la
scène. Au profit de leur antinomie,
lissée à l'envi. Ils ont disparu et
doivent se demander ce qui a bien pu se
passer, entre le moment où ils ont tenu
la vedette et celui où ils ont été
virés. Deux choses, au moins, donnent un
début d'explication. La première est
cette sociologie qui a surgi en Egypte
et qui ne collait en rien à la
«démocratie», mais à des revendications
beaucoup plus concrètes et plus en
rapport avec la justice sociale. La
seconde est l'incapacité des
«démocrates» à surfer sur le
mécontentement, quand les islamistes
pouvaient, un tant soit peu, servir de
pompiers au secours de l'ordre établi.
Alors, le marketing politique de la
«communauté internationale» a changé de
partenaires et de poulains à promouvoir.
Encore une lubie que Belkhadem, qui en
sait un peu plus qu'il n'en faut pour se
laisser intimider par le matraquage, a
décidé de tourner en dérision. Au
contraire de Bouguerra Soltani qui
confondra drague médiatique et
popularité jusqu'à la claque, que son
allié présidentiel aura prophétisée.
Article publié sur
Les Débats
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