Opinion
L'appartenance au
bon camp
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Mardi 21 mai 2013
De temps en
temps, une ONG, un média font dans le
service minimum. Sans fracas et sans
insister, juste pour marquer le coup,
pour parer à toute éventualité
concernant leur probité. Rendons-leur
tout de même grâce, ils permettent
malgré tout, le temps d'un communiqué,
d'un article, d'une émission, que des
damnés non recensés dans la nomenclature
mondialisée des droits de l'homme aient
droit de cité. Parmi ceux-là, les
millions de travailleurs étrangers,
asiatiques pour la plupart, en esclavage
aux Emirats arabes unis. Le prince
héritier de ce pays, Abdallah ben Zayed
Al-Nahyane, s'était rendu à Washington
le 16 avril dernier. Reçu par Barack
Obama, il devait selon Human Rights
Watch se voir signifier «la question des
violations toujours plus nombreuses des
droits fondamentaux aux Emirats arabes
unis». Sans plus. Les travailleurs, en
question, ont leurs papiers confisqués
par leur patron, sont parqués à une
dizaine de kilomètres des lumières qui
fascinent le monde, n'ont pas le droit
de changer d'emploi, quant à faire
grève, voire penser à revendiquer quoi
que ce soit, cela relèverait du
blasphème capital. Pour les nationaux,
ils doivent intégrer le fait que leur
pays est une monarchie absolue. 132
d'entre eux, qui ont signé une pétition
appelant à des élections, se tiennent au
suffrage universel, ont connu les
arrestations en 2011 pour outrage aux
dirigeants du pays. Toujours en 2011,
l'Association des juristes et
l'Association des enseignants sont
dissoutes pour avoir enfreint l'article
16 de la loi de 2008 sur les
associations. Cette loi défend à la
société civile de s'immiscer dans «la
vie politique» ou de se mêler de
«questions pouvant mettre en danger la
sécurité de l'Etat ou le régime au
pouvoir». En juillet 2012, les Nations
unies ont été poussées à se fendre d'une
déclaration où elles se disent
«préoccupées par ce qui s'apparente aux
Emirats à une répression de plus en plus
sévère, sous forme de harcèlements,
d'interdictions de voyager, de
licenciements soudains, d'arrestations,
de dénaturalisations et d'expulsions».
Mais en novembre de la même année, les
Emirats sont (quand même) élus membre du
Conseil des droits de l'homme de l'Onu,
ils y resteront jusqu'en 2015. Ainsi
vont les choses et honni soit qui mal y
pense. Une devise léonine qui colle
comme un gant aux faiseurs de
«démocratie» et aux «libérateurs des
peuples» qui, seuls, décident du contenu
des droits humains. Il ne faut pas
s'étonner alors que les Emirats, ce
paradis «démocratique» où fleurissent
les libertés publiques, les droits
citoyens et le respect de l'humanité,
s'émeuvent, s'étranglent d'indignation à
propos de la Syrie et fassent injonction
à la «la communauté internationale» qui,
selon eux, «ne peut pas garder le
silence et rester inactive face à la
situation humanitaire» des Syriens. Par
la voix de leur ministre des Affaires
étrangères «toutes les parties
concernées sont appelées à prendre une
action politique décisive pour stopper
la machine répressive de Damas». Et ce
n'est pas de l'outrecuidance, seulement
le sentiment de faire partie du bon
camp.
Article publié sur
Les Débats
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