Opinion
Totalitarisme
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Mardi 18 octobre
2011
La notion
de totalitarisme renvoie,
invariablement, à celle d'un ordre qui
dénie, là où il règne, toute pensée
contraire à ses propres conceptions de
la société et du monde. Il faut préciser
que l'autoritarisme à lui seul ne suffit
pas s'il n'y a pas une pensée dominante
qui règne et qui constitue le seul
référent intellectuel, culturel, moral
et politique, dont l'autoritarisme sera
le bras armé. Comme le gendarme joue
celui de la justice, quand sont
transgressées les règles admises par la
majorité des gens. L'illustration du
totalitarisme, dans la pédagogie
régnante, est d'abord le communisme,
présenté bien sûr dans son expression
stalinienne et non dans sa réalité
économique et sociale.
Le nazisme
vient en seconde position, surtout pour
dénoncer ses crimes contre l'Humanité.
Le message délivré étant que, depuis la
chute des bureaucraties staliniennes, ne
doit plus subsister sur la face de la
Terre que la «démocratie», la «libre
entreprise» et l'économie de marché. Ce
qui implique l'exclusion de toute
velléité de «protectionnisme» de la part
d'éventuels candidats à la résistance à
la libre circulation des marchandises et
des capitaux. Le modèle proposé est
celui des Etats-Unis. Un modèle qui
s'est ainsi mis sous les projecteurs de
l'observation et à l'épreuve des faits.
Le constat
n'est guère reluisant quand il s'agit de
mesurer ses apports aux libertés, tant
chantées. Tomislav Sunic, un dissident
du communisme qui a trouvé refuge aux
Etats-Unis, nous en parle dans son livre
«l'homoamericanus», en décrivant les
effets du système sociopolitique
étatsuniens, sur la société : «Il en
résulte une glaciation des libertés
réelles au profit d'une "liberté"
incantatoire et fantasmatique.» Il est
même plus clair : «L'américanisme est un
système idéologique fondé sur une vérité
unique.» On est pourtant dans le
temple de la liberté, quand on nous
décrit les manifestations du
totalitarisme. C'est même effrayant, car
comme le rapporte l'auteur, «dans le
système atomisé de l'américanisme, la
dispersion du pouvoir conduit
inévitablement à une terreur dispersée
dans laquelle la frontière entre la
victime et le bourreau ne peut que
disparaître». Le passage de Bush fils a
beaucoup servi à révéler au monde
l'ampleur de la chose. Peut-être pas par
ses discours, mais sa politique
dévastatrice sur certains peuples qui a
dévoilé la signification du concept de
mondialisation. A ce sujet, le principal
idéologue de Bush ne mâchait pas ses
mots, dès 2001, Michael Ledeen (World
Jewish Review), préconisait un chaos
généralisé comme «seul moyen d'instaurer
un gouvernement mondial». D'autres, plus
subtils, préconisent de reconsidérer
l'acception actuelle de la démocratie
(vers une «postdémocratie»),
en s'appuyant sur l'usure qu'elle est en
train de subir, selon le principe, en
marche, du néolibéralisme qu'il n'y a
pas besoin d'arracher aux peuples leurs
droits, quand ils les abandonnent
eux-mêmes, un à un. L'esprit critique
évacué, le matraquage de plus en plus
féroce, la discréditation systématique
de tout discours contraire, le
totalitarisme nouveau est bien installé.
Il se passe juste qu'il détient encore
le droit de la force, les clés de
l'emprise médiatique universalisée et
qu'il a toujours le pouvoir d'étouffer,
de confiner ou de détruire la
contestation de son hégémonie, encore…
«démocratique».
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