Opinion
Le «peuple élu»
fait du bruit
Ahmed Halfaoui
Mardi 16 août 2011
Il
y a certainement de quoi rester perplexe
devant le mouvement «social» qui anime
les villes israéliennes. Qu'ils soient
quelques milliers ou des centaines de
milliers n'a aucune importance. Le fait
est que, pour la première fois dans
l'histoire des contestations populaires,
il y en ait une qui détonne par la
nature de ses acteurs. Enfants gâtés
d'une «communauté internationale»
très attentionnée et cyniques
indifférents à la tragédie d'un peuple,
dont ils savent qu'ils ont occupé la
terre et les maisons, ils regimbent
parce qu'on s'occupe moins bien de leur
confort. Bien plus, ils protestent
contre les largesses accordées aux
nouveaux colons. Des largesses qui dans
le passé, à l'arrivée en «Terre
promise», leur ont pourtant permis à
eux, à leurs parents ou grands parents
de s'installer et de prospérer en
Palestine. On n'avait pas vu ça en
Algérie, sauf lorsqu'il a été question
d'émancipation des indigènes, vers la
fin du règne colonial. Le problème est
simple. D'un côté, il doit y avoir moins
d'argent qui vient des Etats-Unis et des
lobbies sionistes, et de l'autre il y a
les immenses besoins financiers
nécessaires à l'absorption de ce qui
reste comme terres aux Palestiniens,
avec ce que cela exige comme moyens de
répression. Sans préjudice du
développement d'une machine de guerre à
la mesure des agressions programmées
contre les pays de la région. Ce que n'a
pas manqué de faire savoir Ehud Barak.
Et, dans l'absolu, il a raison. On ne
peut pas avoir le beurre et l'argent du
beurre. On ne peut pas vivre grâce à la
force et affaiblir celle-ci. Ce qui
serait légitime si Israël ne reposait
pas sur la spoliation et l'oppression.
Il y a là, à n'en point douter,
l'ingratitude de ceux qui n'ont jamais
eu à s'interroger sur les causes de leur
bien-être. Voilà ce que dit une
manifestante : «Le contrat est cassé
entre l'Etat et les citoyens. L'Etat
parle sécurité. Mais qu'en est-il s'il
laisse périr la santé publique et
l'éducation ? Ne sera-t-on pas en danger
? Vraiment ? Mesure-t-elle ce
qu'elle dit ? Comme pour déceler, malgré
tout, des similitudes avec les
protestataires du reste du monde,
d'après un organe de gauche, il y aurait
«des habitants de logements publics, des
mères célibataires, des immigrés juifs
d'Asie ou d'Afrique ou encore des
travailleurs migrants». On dit aussi que
88% des Israéliens soutiennent les
revendications. Ici, il faut juste se
rappeler qu'ils n'étaient pas moins
nombreux à approuver le carnage à Ghaza.
Ce qui n'est nullement contradictoire.
Mais, la protesta que l'on observe met à
mal les fondements d'une mythologie qui
n'a que trop duré. Le «Peuple élu»
d'aujourd'hui ne ressemble en rien à
celui, qui d'après la Bible et la doxa
sioniste, aurait erré des dizaines
d'années dans le désert du Sinaï pour
arriver en Palestine et qui y serait
revenu après 2000 ans d'exil. Ce n'est
même plus celui de ce mélodrame nommé
l'Exodus. Il n'ira pas cette fois-ci
plus loin que quelques simagrées, mais
il vient de permettre la démonstration
qu'Israël ne peut se passer de l'état de
guerre permanent et de son
expansionnisme, sans imploser un jour.
Le jour de la désillusion finale de ceux
qui ont été entraînés dans l'une des
pires entreprises de manipulation que le
monde ait connues. Reste à savoir quand
cela se produira. Le temps peut-être où
les contradictions sociales atteindront
un tel seuil qu'il ne sera plus possible
à l'alliance sacrée de tenir. Souhaitons
que, pour l'Humanité, le peuple
palestinien aura trouvé bien avant cela
les voies de sa libération.
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Publié le 16 août 2011 avec l'aimable
autorisation de l'auteur.
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