Opinion
Elles sont
bizarres ces «révolutions»
Ahmed Halfaoui
Jeudi 11 août 2011
Il y a
quelque chose de bizarre dans ces
«révolutions» que quelqu'un, suivi par
beaucoup d'autres, a appelées "
«printemps arabe». Ce qui est bizarre en
elles c'est qu'on n'arrive pas à voir en
quoi ce sont des révolutions, du moins
en l'état actuel des choses. Dans
les deux premières, celles qui ont été
certifiées accomplies comme telles par
qui de droit, ce sont les mêmes qui
gouvernaient avant qui gouvernent
toujours. Et plus le temps passe plus
ceux qui ont cru les avoir faites
se demandent ce qui a bien pu changer.
Quand ils se manifestent, ils sont
matraqués comme avant et parfois
torturés ou tués, par les mêmes forces
de l'ordre qu'avant. Une chose a
toutefois changé, ils doivent se taire,
ne plus bouger, ne plus revendiquer, car
ce serait contre révolutionnaire de le
faire. Et ce sont ceux contre qui la
«révolution» devait avoir eu lieu qui le
disent. D'ailleurs, le président
tunisien provisoire Fouad Mebazaa, un
membre éminent du RCD, vient de décréter une prolongation indéterminée
de l'état d'urgence. Un état d'urgence
soutenu par la «communauté
internationale». Une mesure qui donne le
droit de protéger la «révolution» contre
ceux qui auraient l'intention
«d'empêcher le gouvernement de
travailler». C'est-à-dire ceux qui
veulent se plaindre du fait que l'on
s'occupe mal du pays. Loin, là-bas, à
Sidi-Bouzid où les journalistes ne se
bousculent plus, s'est rendu un reporter
du «New York Times» qui constate
que le portrait de Mohammed Bouazizi, le
symbole de la ville, a été enlevé de son
socle. Personne ne dit qui a osé ce
geste en principe sacrilège, mais
cela n'a pas provoqué d'émotion
particulière. Comme si la chose devenait
secondaire. La famille du héros, elle,
est partie à Tunis. Elle habite
désormais une maison à «200 dollars
mois», à La Marsa, avec «un petit jardin
planté de citrouilles et d'un
citronnier». Une trahison pour les
voisins qui se sentent «abandonnés, dans
un endroit où il n'y a ni emplois, ni
argent, ni espoir, et sans les fameux
Bouazizi pour donner une voix à leur
désespoir». Alors que lorsqu'il y a
révolution la voix du désespoir
est au pouvoir, mais ici de toute
évidence elle ne l'est pas et tout est
fait pour qu'elle n'y soit pas, parce
qu'il aurait fallu vraiment
démanteler le système. Reste la
plus bizarre des «révolutions», la plus
inédite, celle qui est en cours en Libye
où c'est l'OTAN qui s'en occupe.
De plus elle est faite contre le peuple
libyen qui paie cher de ne pas accepter
la procédure. Les journalistes, les
vrais, ceux qui sont reconnus comme tels
trouvent tout à fait normal le travail
des bombardiers. Il y a deux
jours 85 Libyens sont déchiquetés par un
raid. Les journalistes sont sur
place pour constater les faits. Ils ont
vu les maisons et les corps. Voici
comment ils ont rapporté la chose :
«Tripoli accuse l'OTAN d'avoir tué 85
civils». Et pour faire bonne
mesure, ils ajoutent : « l'Otan est
souvent accusée par le régime de tuer
des civils», pour ceux qui
auraient besoin de savoir que c'est
souvent le cas. On vous le répète, elles
sont bizarres ces «révolutions».
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Publié le 11 août 2011 avec l'aimable
autorisation de l'auteur.
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