Opinion
Les rapprochements
des Frères algériens
Ahmed Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Jeudi 11 juillet 2013
Les choses
se décantent, en principe dans pas
longtemps, nous allons y voir plus clair
en matière de déterminants des partis
politiques. Nous allons sortir du flou
qui entoure les programmes et découvrir
les proximités réelles et concrètes
entre les courants qui s'agitent sur la
scène algérienne. La dernière initiative
des Frères algériens du Mouvement de la
société pour la paix (MSP) ne devrait
étonner que ceux qui croient que le
discours religieux se situe dans
l'absolu divin. Il est vrai que depuis
des dizaines d'années la «solution» et
autres slogans pouvaient laisser
supposer que la «loi divine», sous les
déclinaisons les plus diverses selon les
chapelles, était affranchie des
vicissitudes bien terrestres, dès que
l'on sortait des questions de mode de
vie et des règles canoniques du culte.
En fait les Frères, puisqu'ils
représentent le premier courant dit
islamiste qui a atteint le pouvoir, ont
des positions très tranchées sur les
questions de gouvernance. Ces positions
se sont exprimées dans les trois pays,
où ils participent au pouvoir, comme au
Maroc, et où ils exercent ou ont exercé
le pouvoir comme en Tunisie ou en
Egypte. Au Maroc, ils se sont
immédiatement montrés très efficaces en
termes de prise en main et
d'appropriation de la politique
économique du Makhzen, elle-même dictée
par l'ordre mondial dominant. En
Tunisie, c'est le programme qui a valu
les félicitations du Fonds monétaire
international (FMI) à Zine El Abidine
Ben Ali que le parti Ennahdha de Rached
Ghanouchi a adopté. En Egypte, les
Frères ont juste eu le temps de prendre
les contacts, tout en laissant courir
les mécanismes mis en place, par Hosni
Moubarak, pour laminer les moyens de vie
des Egyptiens au profit des «grands
équilibres» exigés par les institutions
financières internationales et leurs
actionnaires. Dévoilant que leur
«solution» était bien terrestre et
qu'elle n'était même pas de leur cru.
Dévoilant surtout qu'ils n'avaient pas
grand-chose contre l'Occident impie et
qu'ils étaient même très en accointance
avec lui. Le «printemps» des Arabes et
assimilés avait déjà mis en guest star
leur cheikh le plus éminent, en tant que
prédicateur des objectifs de l'Otan et
de son armada, quand elle s'était mise à
l'œuvre pour la première fois contre la
Libye. Après tout cela, après que la
lumière eut été faite sur la nature
politique des Frères, le vernis
idéologique, s'il continue à jouer en
tant qu'accessoire identitaire, ne
constitue plus un frein pour peu que les
alliances à réaliser reposent sur les
fondements doctrinaires des intérêts
défendus. Et ces intérêts sont connus.
Les Frères, sans cela, n'auraient jamais
été promus par les Etats-Unis en tant
qu'alliés contre les nationalismes
arabes, de l'Irak à l'Algérie, en
passant par la Syrie. Aujourd'hui, leur
rôle n'a pas changé, ils doivent
seulement servir d'obstacle à un
éventuel retour au temps des Boumediène,
Nasser et autres adversaires de
l'avancée des forces du marché. C'est
ainsi que s'éclairent et que
s'expliquent les rapprochements
«contre-nature» en apparence et en
apparence seulement.
Article publié sur
Les Débats
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