Opinion
L'indécrottable
ingérence
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Lundi 11 février
2013
Il est tout
à fait légitime que les déclarations de
Manuel Valls, le ministre français de
l'Intérieur, et celles de Laurent
Fabius, ministre des Affaires
étrangères, sur la situation en Tunisie
suscitent des réactions. Les deux se
sont clairement positionnés en donneurs
d'ordres. Avec cette insoutenable
arrogance qui a pris des proportions
alarmantes depuis que fut décidé que les
Arabes et assimilés devaient être
«démocratisés», sous le label d'un
«printemps» géré directement et
ostensiblement par l'Alliance
atlantique. Les Frères n'ont pas été
contents et leurs troupes encore moins.
Ils ont légitimement appelé les
dirigeant français, qui lui ont offert
l'occasion de jouer au patriotisme, à
s'occuper de leurs propres affaires.
Plus largement, pourtant, le peuple
tunisien n'a jamais sollicité de
quiconque un parrainage, surtout pas
ceux dont fait partie Chokri Belaïd.
Surtout pas le Front populaire et tous
ces militants qui luttent pour que le
pays puisse un jour offrir une vie digne
à tous ses enfants, qui luttent contre
la politique ultralibérale que comptent
imposer les Frères aux Tunisiens,
assortie d'une chape idéologique
liberticide. La vérité est que s'étant
au départ accommodés d'Ennahdha, soutenu
par les Etats-Unis, le pouvoir Français
est en train d'appréhender l'échec de ce
partenaire du libre-marché et un
changement du rapport de force politique
au détriment du gouvernement actuel.
L'extraordinaire mobilisation contre les
Frères provoquée par l'assassinat de
Belaïd, les divergences des islamistes
qui s'expriment au grand jour et la
paralysie dans laquelle se trouvent les
institutions, y compris l'Assemblée
constituante, ne laissent pas de grands
doutes sur l'issue des prochaines
élections. Si, il faut en faire
l'hypothèse, les événements ne
débouchent pas sur une explosion de
violence, dont les déclencheurs sont
déjà à l'œuvre, les milices d'Ennahdha
appelées «comités de protection de la
révolution» et les groupes islamistes
armés, dont les leaders ne cachent plus
leur volonté d'imposer par la force leur
pouvoir. Sachant leur refus doctrinaire
absolu de soumettre l'application des
canons de la religion aux vicissitudes
des suffrages humains. Même dans ce cas,
l'ingérence est certainement envisagée,
peut-être plus, en usant du devoir de
«protéger les civils» ou de «lutter
contre le terrorisme». Pour le moment,
on n'en est pas là. Les Tunisiens ont
démontré qu'ils avaient les ressources
qu'il faut pour régler entre eux leurs
problèmes de gouvernance. Ils savent, en
outre, ce qu'ils faut faire et ont fort
peu de risques de tomber dans le piège
tendu d'une intervention étrangère. Ils
ont un atout par rapport à ce qui est
dénommé «syndrome algérien». Cet atout
se constitue du puissant mouvement
populaire qui traverse la société civile
tunisienne et de la très populaire et
très implantée Union générale des
travailleurs tunisiens (UGTT), qui
empêchent la récupération du
mécontentement social, en dehors de la
sphère qui le porte politiquement, par
les vendeurs de paradis. Ce qui devrait
contribuer à limiter un déchirement de
la société, une forte extension de
l'activisme violent et l'intensité d'un
éventuel conflit civil.
Article
publié sur
Les Débats
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