Opinion
Où sont les «amis
du peuple libyen» ?
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Dimanche 8 avril
2012
Une fois que l’OTAN leur a offert la
Libye, les «révolutionnaires» labellisés
par Al Jazeera, France 24 & co veulent
se la partager. Cela ne dérange
personne, sauf qu’il ne faut toucher aux
puits et aux installations pétrolières
qui carburent à plein tube. Les tiroirs
des bureaux du Conseil de sécurité et
ceux des ministères aux Affaires
étrangères occidentaux se sont
définitivement refermés sur le dossier
du «printemps» libyen. Le travail est
fini, de ce point de vue. Le chaos
prometteur est bien en place, pour que
les Libyens s’occupent d’autre chose que
de regarder du côté où les affaires se
règlent. Tant pis si l’hurluberlu,
ex-numéro 2 du CNT, se lamente sur
«l’abandon fatal» et sur le fait que
«dès que le régime s'est effondré, tout
le monde a disparu». Personne ne lui a
répondu, sauf Catherine Ashton de
l’Union européenne qui n’a pas pu ne pas
le cajoler un peu, pour la forme. Il
avait tant fait, quand même, pour que
les bombardiers configurent la Libye
qu’il faut, pour qui il faut. Il
méritait qu’on le rassure, en attendant
qu’il comprenne, par lui-même, que les
supplétifs ne comptent que le temps du
service que l’on attend d’eux. Ils n’ont
qu’à se débrouiller, seuls, ensuite. En
fait, le gars doit croire, comme ses
pairs, qu’il est encore possible que
l’OTAN revienne mettre de l’ordre et
faire rentrer les «révolutionnaires» à
la maison de façon à compléter le
travail d’installation effective du CNT
au pouvoir. Un rêve de niais, affolés
par le spectacle sanglant des combats
fratricides, qui fait la quotidienneté
de la Libye «libérée», selon la
«communauté internationale». Un
spectacle dont la mise en scène,
onusienne et atlantiste, n’a donné ni le
scénario ni même le synopsis. Pour se
consoler ou pour donner le change, ce
qui fait office de gouvernement dit à
qui veut bien le croire que «ce n’est
pas facile de passer d’une révolution
armée à un Etat démocratique dans un
pays qui a connu quarante ans de
dictature». Comme si la «révolution»
libyenne, à l’inverse de toutes les
révolutions connues, devait déboucher
sur une situation pire que celle qui l’a
«justifiée» aux yeux des téléspectateurs
du monde entier. Sa spécificité devait
déboucher, contre toute attente, sur la
légalisation du racisme le plus abject,
du sadisme, des crimes, de la prédation
et sur les guerres entre gangs et entre
tribus et sur le dépeçage en cours du
pays. Dans ce dépeçage, après la
Cyrénaïque, ce sont les tribus touareg
qui veulent leurs propres frontières.
Elles entendent, les armes à la main,
depuis peu, s’imposer au sud du pays. La
tribu de Zentane, qui ne l’entend pas de
cette oreille, à cause de ses ambitions
de rayonner en dehors de ses bases, sous
l’emprise d’une poussée boulimique,
tente de s’opposer à elles. On
enregistre des morts des deux côtés. Et
la chose ne semble pas être près de se
terminer, car il faut dire que les
trafics en tout genre (alcool, drogues,
cigarettes) produisent un immense
pactole qui n’est pas près de se tarir,
étant donné la demande croissante de ces
produits par les populations nordistes.
A l’Ouest, les Berbères de Zouara
affrontent les «Arabes» des villes
voisines d'Al Djoumaïl et de Regdaline.
Mais cela intéresse-t-il les «amis du
peuple libyen», des «amis» qui lui
voulaient tout le bien où il baigne
aujourd’hui.
Article publié sur
Les Débats
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