Opinion
Pourquoi
militariser la démocratie ?
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Jeudi 8 mars
2012
L’ex-ministre de la Justice de Kadhafi,
«recruté» pour servir de chef indigène à
l'opération de «démocratisation» de la
Libye, explique à qui veut l'entendre
que ce qui se passe en Libye a pour
«raison la démocratie», quand il
n'accuse pas l'ancien chef d'Etat
d'avoir monté les Libyens les uns contre
les autres. Voyons voir de quoi elle est
capable, cette «démocratie» aéroportée.
Après les cocoricos de la «victoire»,
qui continuent d'ailleurs de se faire
entendre, des «prisonniers» ont les
«organes génitaux coupés», d'autres ont
subi des «décharges électriques» ou le
fouet, beaucoup sont morts ou sont en
train de mourir. Être noir de peau fait
risquer le pire, la mise en cage ou
l'assassinat. Les joyeusetés de ce genre
animent la Libye «démocratisée», mais
les «démocratiseurs» sont déjà occupés
ailleurs à trouver le moyen de
«démocratiser» la Syrie et ne démordent
pas, encore, de le trouver. Alors qu'ils
devraient présenter leur bilan et
répondre de la situation où ils ont mis
un peuple qui ne leur a rien demandé,
quoi qu'ils puissent inventer. C'est
ainsi qu'aussitôt élu président de la
Russie, l'empêcheur de «démocratiser» en
rond, Vladimir Poutine, est supplié de
laisser l'OTAN faire un carton,
installer son CNS «représentatif» au
pouvoir et livrer aux bandes armées la
mise en coupe réglée du pays. Le culot
n'a plus aucune limite. On pourrait
presque voir de la bave dégouliner des
lèvres des prédateurs qui, aveuglés par
leur soif de faire main basse sur une
nouvelle proie et faute d'avoir un
quitus pour y aller avec leurs
bombardiers, ont décidé d'armer les
Syriens les uns contre les autres. Ils
disent, comme pour la Libye, que c'est
pour aider les «révolutionnaires» à se
battre. Ce, malgré les voix qui
s'élèvent de l'intérieur de ce pays, que
les médias n'entendent pas. «Nous
objectons aux appels à armer
l'opposition, parce que cela conduirait
à une guerre civile complète», hurle à
qui veut l'entendre Hassan Abdul-Azim,
chef du «Comité de coordination de
l'opposition nationale», parce que
dit-il, «armer l'opposition ne pourrait
que faire couler davantage de sang, et
nous nous y opposons». Lui, il sait de
quoi il retourne et il sait par dessus
tout qu'il n'est nullement question de
démocratie, mais de destruction de la
Syrie en tant qu'Etat, au profit des
occultes intérêts de l'impérialo-sionisme
dans la région. Sinon on aurait eu
affaire à de toutes autres exigences de
la «communauté internationale», qui ne
veut pas ce que les Syriens veulent.
Elle ne veut pas que soient mis en œuvre
des processus d'ouverture, qui
aboutiraient à des consultations libres
et pluralistes où les gens du CNS
pourraient, s'ils le veulent bien, venir
démontrer par les urnes la confirmation
de la «représentativité» que leur a
conférée Hillary Clinton, au sein des
«amis du peuple syrien». Le pouvoir
actuel étant prêt à jouer le jeu, il est
temps que soit mis fin à la démarche
va-t-en guerre, que rien ne justifie,
sauf des intentions criminelles, qui
intègrent de fait les flots de sang qui
couleront et qu'il y a un peuple à
soumettre par la violence.
Article publié sur
Les Débats
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