Opinion
Ce «printemps»
plein d'enseignements
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Mercredi 3 avril
2013
A quelques
jours d'intervalle, le président de
l'une des premières puissances
européennes, l'un des hommes qui peuvent
décider du sort d'un pays, d'un peuple,
comme nous l'observons au Mali, vient de
dire, sans sourciller, une chose puis
son contraire. A la mi-mars, François
Hollande déclarait : «Nous souhaitons
que les Européens lèvent l'embargo… La
France doit d'abord convaincre ses
partenaires. Si d'aventure il devait y
avoir un blocage, alors la France
prendrait ses responsabilités.»
Fin-mars, l'air de rien, il dit qu'«il
ne peut pas y avoir de livraisons
d'armes à la fin de l'embargo… s'il n'y
a pas la certitude que ces armes seront
utilisées par des opposants légitimes et
coupés de toute emprise terroriste».
Argument que tous les opposants au
projet avaient avancé, contre lequel il
menaçait d'y aller seul, et qu'il
développe sans vergogne, comme s'il en
était le prescripteur. «Pour l'instant,
nous ne l'avons pas cette certitude,
nous ne le ferons pas tant qu'il n'y a
pas de certitude qu'il y a un contrôle
total par l'opposition de la situation.»
En dehors des doutes que nous pouvons
légitimement avoir sur la consistance de
ses engagements, il y a certainement une
explication qu'il faut chercher à cette
volte-face non assumée. Et elle n'est
pas loin. Elle crève les écrans de
l'actualité syrienne. Ce sont les
craquements qui affectent le bel édifice
que constituait la Coalition, ce
substitut au CNS qui a fait
lamentablement faillite, alors que,
rappelons-nous, Hillary Clinton en avait
fait le «représentant légitime du peuple
syrien». La démission de Ahmed Moaz
Al-Khatib, homme-lige des Européens, et
l'intrusion au forceps de Ghassan Hitto
importé du Texas. Avant cet imprévu, le
pouvoir français assurait savoir à quels
groupes livrer les armes, pour inverser
le rapport de force sur le terrain. La
certitude a donc vécu. Retour, encore
une fois, à l'aveu que l'embrouillamini
est total. Mais maintien, quand même, de
la mythologie d'une «révolution» qu'il
faut soutenir et les médias gardent le
cap, subissant régulièrement des revers
déontologiques, provoqués par des
journalistes dont la moralité a pu
résister au diktat du mensonge. L'un des
derniers cas en date est celui d'Amber
Lyon, reporter et correspondant de CNN,
trois fois titulaire du prestigieux Emmy
Award (prix décerné, aux Etats-Unis, par
l'Academy of Television Arts & Sciences
aux meilleures émissions et aux
meilleurs professionnels de la
télévision). Sa réputation n'a pas ému
ses patrons, la journaliste est
licenciée en mars 2012 «dans le cadre
d'une réorganisation de la chaîne»,
après avoir subi les pires pressions à
cause de son refus de dévoyer la vérité
sur la répression au Bahreïn. Selon le
nouveau mode de fonctionnement des
organes de presse, ils n'ont plus besoin
de journalistes ni de traitement de
l'information. Quand sera liquidé le
dernier professionnel, ils pourront à
loisir régner sur de simples O.S
automatisés chargés de reproduire des
bulletins formatés au goût de
l'imprimatur, qui contrôle l'essentiel
des médias et continue d'étendre son
emprise sur le peu qui reste d'espaces
«impertinents».
Article
publié sur
Les Débats
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