Interception
téléphonique
Conversation entre l’assistante du
secrétaire d’État et l’ambassadeur US
en Ukraine
Réseau Voltaire
Victoria
Nuland et l’ambassadeur Geoffrey R.
Pyatt,
venus apporter leur soutien aux
manifestants de la place Maidan.
Vendredi 7 février 2014
L’apparition sur YouTube d’une
conversation interceptée entre
l’assistante du secrétaire d’État
Victoria Nuland et son ambassadeur en
Ukraine a soulevé un vif conflit entre
Washington et Bruxelles. Mais
l’important est ailleurs : la
conversation montre que les États-Unis
ne sont pas intéressés par les slogans
officiels des manifestants de la place
Maidan (le rattachement à l’Union
européenne), mais qu’ils œuvrent pour
changer le régime, placer un homme à eux
au pouvoir, et répandre les troubles.
Vous trouverez
ci-dessous la traduction d’une
conversation téléphonique entre Victoria
Nuland, sous-secrétaire d’État des
États-Unis, et Geoffrey R. Pyatt,
ambassadeur US en Ukraine.
Cette conversation aurait été
interceptée entre le 22 et le 25 janvier
2014. Elle est apparue mystérieusement
sur YouTube, suscitant d’abord un
démenti du département d’État. Puis, le
scandale prenant de l’ampleur après la
publication d’un article du Kyiv Post,
Victoria Nuland a présenté ses excuses à
l’Union européenne, tout en suggérant
que l’interception aurait pu être le
fait des services secrets russes qu’elle
a accusé d’avoir violé une conversation
privée —une remarque distrayante de la
part d’un État qui espionne la
quasi-totalité des communications dans
le monde—.
Victoria Nuland est une diplomate
néo-conservatrice, épouse de l’historien
Robert Kagan. Elle fut la principale
conseillère en politique étrangère du
vice-président Dick Cheney, avant d’être
nommée par George W. Bush, ambassadrice
auprès de l’Otan. Hillary Clinton en fit
sa porte-parole au secrétariat d’État,
puis John Kerry son assistante pour
l’Europe et l’Eurasie. C’est elle qui
dirige les opérations de déstabilisation
de l’Ukraine.
Dans cette conversation, elle donne,
dans un anglais trivial, instruction
pour répondre à la proposition faite par
le président Ianoukovytch de laisser
l’opposition constituer un gouvernement.
Il faut, selon elle, placer Arseni
Iatseniouk, maintenir Wladimir Klitschko
hors jeu, et écarter le leader nazi Oleh
Tyahnybok qui devient encombrant.
Au passage, on apprend que l’ancien
diplomate états-unien, Jeffrey Feltman,
aujourd’hui secrétaire général adjoint
des Nations Unies, nomme qui il veut à
l’Onu et utilise cette organisation pour
donner un vernis légal aux actions
secrètes des USA. En l’occurrence, il a
pu nommer comme représentant de l’Onu,
le Néerlandais Robert Serry, ancien
responsable des « opérations » de
l’Otan.
En définitive, les choses ne sont pas
passées comme prévues et l’opposition
n’a pas formé de gouvernement.
Victoria Nuland
: Que pensez-vous ?
Geoffrey R. Pyatt :
Je pense que nous jouons. La pièce
Klitchko est évidemment l’électron
le plus compliqué ici, en
particulier le fait qu’on l’ait
annoncé comme vice-Premier ministre.
Vous avez vu mes notes sur la
difficulté du mariage en ce moment,
nous essayons d’obtenir une lecture
très rapide pour savoir s’il fait
partie de l’équipe. Mais je pense
que votre raisonnement à son sujet,
que vous aurez besoin de lui dire
—je pense que c’est le prochain coup
de téléphone que vous souhaitez
organiser— est exactement celui que
vous avez fait à Yats [surnom de
Iatseniouk]. Je suis heureux que
vous l’ayez mis sur la sellette
(...) Il s’inscrit dans ce scénario.
Et je suis très heureux qu’il a dit
ce qu’il a dit.
Victoria Nuland
: Bon. Je ne pense pas que Klitsch
[surnom de Klitschko] devrait être
dans le gouvernement. Je ne pense
pas qu’il soit nécessaire, je ne
pense pas que ce soit une bonne idée
.
Geoffrey R. Pyatt :
Oui, je veux dire… je suppose… Pour
ce qui est de sa non-participation
au gouvernement, je serais d’avis de
le laisser en dehors pour qu’il se
consacre à ses obligations
politiques. Je ne fais que
réfléchir, pour trier les options
pour avancer, nous voulons garder
ensemble les démocrates modérés. Le
problème sera avec Tyahnybok et ses
gars. Et, vous savez, je suis sûr
que cela fait partie du calcul de
Ianoukovytch.
Victoria Nuland
: Je pense Yats, c’est le gars. Il
a de l’expérience économique et de
l’expérience de gouverner. C’est le
gars. Vous savez, ce qu’il a besoin,
c’est que Klitsch et Tyahnybok
restent à l’extérieur. Nous aurons
besoin de leur parler quatre fois
par semaine. Vous savez, je pense
juste que si Klitchko entre, il va
devoir travailler à ce niveau avec
Iatseniouk, c’est juste que ça ne va
pas marcher…
Geoffrey R. Pyatt :
Ouais, ouais , je pense que c’est
vrai. Ok , bon. Souhaitez-vous que
nous organisions un appel avec lui
comme prochaine étape ?
Victoria Nuland
: Ma conception de l’appel dont
vous parlez, c’est que les trois
grands participent à leur propre
réunion et que Yats leur propose
dans ce contexte. Vous le savez, une
conversation « trois plus un » ou
« trois plus deux » si vous
participez. C’est ainsi que vous le
comprenez ?
Geoffrey R. Pyatt :
Non, je pense que c’est ce qu’il a
proposé, mais connaissant leur
dynamique interne lorsque Klitchko
était le chien dominant, il va
prendre son temps avant de se
pointer à une de leurs réunions et
doit déjà être en train de parler à
ses gars. Donc je pense que si vous
vous adressiez directement à lui,
cela aiderait à faire de la gestion
de personnalités parmi les trois.
Cela vous donne également une chance
d’agir vite sur tout cela et nous
permettra d’être derrière avant
qu’ils s’assoient et qu’il explique
pourquoi il n’est pas d’accord.
Victoria Nuland
: Ok. Bon. Je suis heureuse.
Pourquoi ne le contacteriez-vous pas
pour voir si il veut parler avant ou
après.
Geoffrey R. Pyatt :
Ok, je vais le faire. Merci.
Victoria Nuland
: Je ne me souviens pas si je vous
ai dit ou si je n’en ai parlé qu’à
Washington : quand j’ai parlé à Jeff
Feltman ce matin, il avait un
nouveau nom pour le type de l’ONU :
Robert Serry. Je vous ai écrit à ce
sujet ce matin.
Geoffrey R. Pyatt :
Oui, j’ai vu cela.
Victoria Nuland
: Ok. Il a obtenu aujourd’hui, à la
fois de Serry et de Ban Ki-moon, que
Serry vienne lundi ou mardi. Ce
serait formidable, je pense, ça
aiderait à souder ce projet et
d’avoir l’aide de l’ONU pour le
souder et, vous savez quoi,
d’enculer l’Union européenne.
Geoffrey R. Pyatt :
Non, exactement. Et je pense que
nous devons faire quelque chose pour
le faire coller à nous, parce que
vous pouvez être sûre que s’il
commence à prendre de l’altitude,
les Russes vont travailler dans les
coulisses pour essayer de torpiller.
Et encore une fois le fait que c’est
sur la place publique en ce moment,
dans ma tête, je suis encore à
essayer de comprendre pourquoi
Ianoukovytch (…) ça. En attendant,
il y a actuellement une réunion d’un
courant du Parti des Régions et je
suis sûr qu’il y a un débat très
animé dans ce groupe à ce sujet.
Mais de toute façon , nous pourrions
faire tomber la crêpe du bon côté si
nous nous agissons rapidement. Alors
laissez- moi travailler sur
Klitschko et si vous pouvez juste
conserver… Je pense que nous
devrions juste chercher à trouver
quelqu’un avec une personnalité
internationale pour accoucher de
notre projet. L’autre question
concerne Ianoukovytch, mais nous en
reparlerons demain, nous verrons
comment les choses commencent à se
mettre en place.
Victoria Nuland
: Donc, sur ce point, Jeff, quand
j’ai écrit la note, Sullivan [Jacob
Sullivan, qui avait été conseiller
de Joe Biden, est un des
négociateurs du Conseil de sécurité
nationale des États-Unis.]] m’a
répondu d’une manière très formelle
en disant que j’avais besoin de
Biden et j’ai dit probablement
demain pour les bravos et pour
réussir à faire coller les détails.
Donc, Biden est prêt.
Geoffrey R. Pyatt :
Ok. Très bien, merci.
Source
Oriental Review
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